Aurélie Jean, docteure en sciences, entrepreneure et auteure à accepté de partager avec nous son parcours scolaire et revenir sur des anecdotes qui ont rythmé son parcours professionnel. Nous la remercions chaleureusement pour le temps qu’elle nous a accordé. 

 

crédit Frederic Monceau

Parlez-nous de votre cursus scolaire, comment avez-vous choisi de vous orienter vers les sciences et l’informatique ?

Étant attirée et bonne élève en physique et en mathématiques, j’ai choisi de continuer dans ces deux disciplines à l’université Sorbonne Pierre et Marie Curie. C’est en deuxième année de licence que je découvre les sciences informatiques et en particulier la science algorithmique dans le cadre d’un cours optionnel. Je raconte cette étape importante de ma vie d’étudiante dans mon livre “De l’autre côté de la Machine, voyage d’une scientifique dans le pays des algorithmes”.

Je décide ensuite de me tourner vers la mécanique des solides qui est une matière entre la physique et les mathématiques, puis vers la mécanique numérique qui consiste à utiliser les sciences informatique et algorithmique pour modéliser et simuler le comportement mécanique (élasticité, plasticité, rupture…) des matériaux. Durant ma thèse de doctorat je découvre une matière supplémentaire, la morphologie mathématique qui s’appuie sur la théorie des ensembles et que j’ai combinée à la science informatique pour modéliser et simuler la géométrie du matériau que j’étudiais à l’échelle nanoscopique.

Adolescente, aviez-vous une appétence particulière pour les sciences ?

J’ai toujours été plus attirée par les sciences que par les matières littéraires, surement parce que les mathématiques ou la physique étaient rassurants car il ne pouvait y avoir aucune subjectivité dans l’évaluation de mon travail. Il me semblait que l’évaluation de la résolution d’un problème mathématique était plus évidente et plus juste que l’évaluation d’une rédaction par exemple. Ce n’est peut-être qu’une impression mais c’est ce que je ressentais… encore aujourd’hui les mathématiques ont quelque chose de rassurant à mes yeux… c’est étrange non ? (rires…)

Votre parcours est assez varié avec de nombreuses expériences, si vous deviez en retenir une qui vous a particulièrement marqué laquelle serait-elle ?

Tellement difficile d’en retenir une en particulier ! J’ai adoré tout ce que j’ai fait.
Si je devais retenir un sujet en particulier, ce serait en lien avec un souvenir marquant. Je pense à mon travail de modélisation du traumatisme crânien pour en comprendre les mécanismes quand j’étais dans l’équipe du Prof. Raul Radovitzky au MIT à Boston.

Quelques semaines après avoir publié un article dans le journal de l’Académie des sciences américaine sur notre travail, je reçois un mail d’un ancien soldat d’Afghanistan qui me remercie pour mon travail car cela aidait des gens comme lui qui subissent les conséquences de traumatismes crâniens vécus sur le front en étant exposé aux ondes de pression provenant d’engins explosifs improvisés. Ca m’a émue car j’ai réalisé ce jour-là que mon travail servait vraiment à quelque chose ! Je conclue mon livre “De l’autre côté de la Machine” avec cette anecdote.

Vous vous identifiez comme une scientifique numérique, qu’entendez-vous par cela ?

En Anglais on dit Computational Scientist, ce qu’on peut traduire comme Scientifique numéricienne.
Les numériciens (computational scientists en anglais) sont légèrement différents des informaticiens (computer scientist en anglais), car ils utilisent les sciences informatiques comme un outil, comme une méthode pour résoudre des problèmes mathématiques, médicaux ou physiques par exemple, ce que je fais.

Pensez-vous que l'IA est un secteur prometteur pour l'avenir ?

L’IA est un secteur prometteur depuis un moment déjà. Il y a énormément de domaines et d’industrie qui vont profiter dans le futur de modèles algorithmiques toujours plus performants et plus précis. C’est à nous de décider ce qu’on fera avec ces modèles, ces outils et ces technologies. C’est en cela que je pense que chacun doit comprendre les tenants et les aboutissants de ces entités mathématiques et numériques pour permettre d’affiner son jugement, prendre de bonnes décisions et mettre la pression intelligemment sur les acteurs et les institutions quand il le faut.

C’est pourquoi j’essaye à la hauteur de mes moyens, d’expliquer encore et toujours à travers mes livres et mes articles, pour fournir une grille de compréhension de ce nouveau monde à mes lecteurs!

Vous souhaitez en savoir plus ?

Découvrez les deux livres d’Aurélie Jean : « De l’autre côté de la machine, voyage d’une scientifique au pays des algorithmes » et « les algorithmes font-ils la loi ? ».