À la suite de notre partenariat avec l’Association Française d’Astronomie, nous avons eu le plaisir de rencontrer Caroline Freissinet, chargée de recherche au CNRS, qui participe à beaucoup de projets spatiaux (Curiosity, ExoMars, Dragonfly …).
Elle a accepté de partager avec nous son parcours scolaire et les enjeux de son métier pour montrer l’importance de l’enseignement des mathématiques et des sciences. Nous la remercions chaleureusement pour le temps qu’elle nous a accordé.

 

Parlez-nous de votre cursus scolaire, comment avez-vous choisi de vous orienter vers la biologie ?

J’ai obtenu un baccalauréat Scientifique à Pau. À la suite du lycée, je savais que voulais rester dans le milieu scientifique mais je n’avais pas d’idée exacte de métier. J’ai donc commencé par une première année de médecine où je me suis passionnée pour la biologie.

Je voulais comprendre l’origine de la vie sur Terre

Me rendant compte que j’étais alors plus intéressée par l’exobiologie (apparition de la vie sur Terre, recherche dans des milieux extraterrestres…), que par la biologie appliquée à l’humain, j’ai quitté le cursus de médecine pour me diriger vers une université de biologie.

J’ai ensuite organisé mon parcours universitaire en fonction de mes affinités : astrophysique, exobiologie … Au fil des années, je me suis spécialisée en biologie primitive, origine de la vie et extrapolation dans des milieux extraterrestres.

Aujourd’hui, ce cursus de biologie à évolué vers celui de chimiste puisque je fais de la chimie de laboratoire et de la construction instrumentale (ingénierie).

Adolescente, aviez-vous une appétence particulière pour les sciences ?

Mon grand frère faisait un cursus scientifique, je me suis donc lancée dans cette voie un peu par défaut. À l’époque je n’avais pas d’intérêt particulier pour les mathématiques, la physique et encore moins la biologie. Cependant, j’étais très curieuse et c’est ce qui m’a poussé à m’intéresser et à vouloir apprendre !

C’est très difficile de s’orienter au lycée. Je crois qu’en tant qu’élève on ne comprend pas toujours les applications concrètes qui se cachent derrière les mathématiques ou les TP de sciences.
En mathématiques par exemple, ce ne sont pas seulement des équations qu’on apprend à résoudre mais plutôt un raisonnement, une façon de penser qui sera applicable plus tard dans beaucoup de domaines.
Aujourd’hui encore j’applique au quotidien ce raisonnement mathématiques appris pendant mon parcours scolaire.

Vous travaillez maintenant au CNRS, à quoi ressemble votre quotidien en tant que chercheuse ?

Ce qui est génial dans le métier de chercheur, c’est qu’aucune journée ou semaine ne se ressemble ! Mon travail se scinde en trois parties distinctes :

  • CHIMIE - Le laboratoire:
    Une partie de mon activité consiste à monter des expériences, trouver des résultats et essayer de les comprendre. La méthode utilisée est la même que celle apprise en classe de sciences (hypothèse à expérience à résultats) à l’exception que les instruments utilisés sont plus pointus que ceux qu’on trouve sur les paillasses du lycée !

 

  • CONSTRUCTION - Participation à la construction d’instruments :
    Dans mon laboratoire, nous construisons des instruments d’analyses chimiques qui sont ensuite intégrés sur des sondes envoyées dans l’espace pour explorer le système solaire.
    Ces derniers permettent de faire des analyses directement depuis les différents corps du système solaire.

 

  • MISSIONS DE TERRAIN - Collecte d’échantillons :
    Avant d’envoyer les instruments que nous avons construits dans l’espace nous devons les tester pour s’assurer qu’ils fonctionneront dans un environnement extraterrestre.
    Nous allons donc prélever, dans des milieux terrestres extrêmes (Arctique, lacs hypersalins …), des échantillons de matières qui ressemblent à celles présentes dans le système solaire. Nous les ramenons ensuite en laboratoire pour tester les instruments que nous avons construits.

Une fois ces trois phases validées, les sondes sont envoyées dans l’espace pour récolter des données que nous analysons par la suite.

En complément de ces trois activités, je participe aussi à beaucoup de conférences pour présenter les résultats que nous récoltons et informer le public de l’avancée des projets spatiaux.
Mon emploi du temps quotidien évolue donc en fonction des priorités du moment et est étroitement lié aux missions spatiales en cours ou à venir.

Comment vous sentez-vous en tant que femme dans votre poste au CNRS ?

Depuis les années 1970, on remarque que la part des femmes dans les métiers scientifiques ne cesse d’augmenter. Aujourd’hui, la proportion de femmes au CNRS est d’environ 40%. C’est très positif et on peut donc imaginer arriver prochainement à un réel équilibre hommes/femmes dans ces métiers.

Je ne me présente pas comme une femme scientifique mais comme une scientifique

Personnellement, je n’ai jamais eu de barrière en tant que femme au sein de mes études ni de mon travail. Je pense que pour les générations futures tout sera complètement naturel !

Vous souhaitez en savoir plus ?

Retrouvez plus d’informations sur les missions spatiales en cours (Curiosity, Persévérance, Dragonfly …) dans la deuxième partie de notre interview avec Caroline Freissinet.

 

Image : Dragonfly - image de SYNTHESE. crédit JHU/APL